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Maintien de la biodiversité : enjeux et mesures nationales

De Wiklimat

Sommaire

Qu’est ce que la biodiversité ?

Le grand scientifique américain, Edward O. Wilson, considéré comme l’inventeur du mot « biodiversity », en donne la définition suivante : « la totalité de toutes les variations de tout le vivant ». Selon les scientifiques, la biodiversité désigne la variété et la diversité du monde vivant, ainsi que la dynamique des interactions dans des milieux en changement. La biodiversité est une dimension essentielle du vivant. Elle est garante de la productivité des écosystèmes et de leur capacité d’adaptation et d’évolution face au changement global, Elle se décline en diversité écologique ou écosystèmique (les milieux), en diversité spécifique (les espèces), et en diversité génétique. Le maintien de la biodiversité est une composante essentielle du développement durable.


Quelle valeur attribuer à la biodiversité ?

Résultat de plusieurs milliards d’années d’évolution du vivant, la biodiversité assure des fonctions indispensables à toutes les formes de vie et nous rend trois grands types de services essentiels: le prélèvement (bois, fleurs, animaux...) qui fournit la matière première et sert à l'alimentation, la régulation et le maintient de la qualité de l'eau, de l’air et des sols (oxygène, dioxyde de carbone, érosion, pollinisation...), et le culturel (patrimoine, promenades, valeur éducative de la nature...).
Il n'est pas simple d'évaluer ces services, mais malgré tout, un article publié dans la revue Nature en 1997 [1], bien que critiqué, estimait les services écosystémiques rendus à l'échelle planétaire à 33 000 milliards de dollars par an. Cependant, s'il est possible d'estimer la perte que représenterait la non-pollinisation des plantes par les insectes (environ 150 milliards de dollars par an [2]), il est très difficile d'évaluer la perte des micro-organismes du sol du fait de leur interaction avec les plantes. Tous ces micro-organismes sont pourtant indispensables.

Comment évaluer la biodiversité ?

La biodiversité est un concept difficile à appréhender et à généraliser puisque, comme nous venons de le voir, elle s’exprime à différents niveaux du vivant : les gènes, les espèces, les habitats et les écosystèmes.
L'inventaire des espèces est une manière d'analyser la biodiversité dans sa capacité à distinguer un organisme d'un autre. Cette méthode est confrontée au problème de la constante évolution du nombre d'individu dans le temps. De plus, la science ne connaitrait qu'une partie de cette diversité biologique : plus de 1,7 million d'espèces ont été découvertes, mais certains scientifiques estiment à plusieurs millions leur nombre total. De plus, les interactions au sein de l'écosystème, la position dans la chaîne alimentaire, la taille des populations, la diversité génétique au sein d'une même espèce, les limites d'un écosystème sont également souvent méconnues [3].
Deux indicateurs globaux sont produits chaque année : un inventaire mondial de l’état de conservation global des espèces végétales et animales (liste rouge des espèces menacées) par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et l'indice « planète vivante » (IPV) de WWF qui mesure l'état de la biodiversité mondiale via la mesure des tendances des populations de vertébrés vivant dans les écosystèmes terrestres (555 espèces), d’eau douce (323 espèces) et marins (267 espèces). Ces deux indicateurs ont l'avantage d'être synthétique et lisible par le plus grand nombre, mais ils ne permettent pas de rendre compte de la complexe réalité de la biodiversité.

La France, au travers de la Stratégie nationale de la biodiversité (SNB), a défini depuis début 2006, selon le modèle État-Pressions-Réponses, 27 indicateurs pour la France métropolitaine et 25 pour la France d'outre-mer. La sélection de ces indicateurs s’est appuyée sur les réflexions menées au niveau européen dans le cadre du programme SEBI 2010 (Streamlining european biodiversity indicators towards 2010) de la stratégie européenne pour la biodiversité, le SEBI 2010 s’inspirant lui-même des réflexions concernant les indicateurs, engagées dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.
Le jeu d’indicateurs retenu pour la France métropolitaine est répartis selon les 7 enjeux définis au niveau communautaire, à savoir:

  • État et évolution des composantes de la diversité biologique ;
  • Menaces et pressions sur la biodiversité ;
  • Intégrité des écosystèmes et biens et services fournis par les écosystèmes ;
  • Usage durable ;
  • État de l’accès aux ressources génétiques et du partage des avantages ;
  • État des transferts et de l’utilisation des ressources financières ;
  • Opinion publique.

Pour en savoir plus sur les indicateurs de suivi de la biodiversité en métropole : Stratégie nationale pour la biodiversité –  Présentation des indicateurs de suivi de la biodiversité pour la métropole (PDF - 1648 Ko)
Pour la France d'outre mer, la répartition est faite selon trois enjeux:

  • État et évolution des composantes de la diversité biologique ;
  • Menaces et pressions sur la biodiversité ;
  • Réponses.


État de la biodiversité en France

La France, avec la métropole et les territoires d’outre-mer, est présente sur deux continents et dans trois océans: c’est le 2ème domaine maritime du monde avec 11 millions de km².
D'après les experts, il y aurait huit zones principales en Europe de répartition des êtres vivants. La France métropolitaine en rassemblerait quatre : les zones atlantique, continentale, méditerranéenne et alpine. De plus, elle se positionnerait à la première place Europeéenne pour la diversité des amphibiens, des oiseaux et des mammifères.
En outre-mer, la majorité des territoires français sont situés dans quatre points chauds de la biodiversité (zone géographique contenant au moins 1500 espèces végétales endémiques mais qui a déjà perdu au moins 70 % des espèces présentes dans leur état originel) sur les 34 qui ont été recensés sur la planète, et la Guyane est située dans l'Amazonie, un des derniers grands massifs forestiers de la planète. Enfin, 10 % des récifs coralliens et des lagons de la planète sont situés dans les eaux placées sous juridiction française.
Mais ce patrimoine est menacé par de multiples pressions, dont les cinq principales sont la destruction, la fragmentation et l’altération des habitats naturels (chaque année, plus de 60 000 ha de terrains agricoles et de milieux naturels sont transformés en routes, habitations, zones d’activités), l’introduction d’espèces exotiques envahissantes, la pollution de l’environnement, la surexploitation des espèces et le changement climatique. Ainsi, d'après un rapport du MEDDTL publié à l’occasion de la Journée Internationale de la Biodiversité, qui s’est tenue le 22 mai, la moitié des 35 200 espèces animales et végétales recensées en France est menacée d’extinction.

Mesures politiques pour restaurer la biodiversité

En 1992, au sommet de la Terre à Rio de Janeiro, tous les pays se sont engagés pour la protection et la restauration de la diversité du vivant par la signature d'une Convention sur la diversité biologique. Cette convention s'est déclinée au niveau Européen par la création d'un réseau écologique: le réseau Natura 2000. En 2001, le sommet européen de Göteborg a fixé l'objectif « d'arrêter le déclin de la biodiversité en Europe d’ici 2010 ». La France s’est ainsi dotée en 2004 d’une Stratégie nationale pour la biodiversité. Cette stratégie est un instrument majeur de la politique de lutte pour la protection et de la valorisation de la biodiversité, en métropole, en outre-mer, ainsi que dans les espaces marins sous souveraineté nationale. Cet objectif est décliné pour chacune des composantes essentielles du vivant, et sa mise en œuvre opérationnelle se traduit à l’heure actuelle par dix plans d’actions (piloté par le ministère technique concerné) et des plans locaux outre-mer pour chaque DOM-COM:

Des indicateurs biologiques (voir plus haut) sont également définis afin d'évaluer les progrès réalisés. Le Grenelle de l'Environnement est ensuite venu renforcer et compléter la SNB et c'est ainsi que des mesures concernant les trames vertes et bleues structurent fortement le plan d’actions pour le patrimoine naturel.

Ainsi la politique nationale de lutte pour le maintien de la biodiversité se structure en quatre volets :

  • la protection des espaces et des milieux : actuellement avec les parcs nationaux, les réserves naturelles, Natura 2000, les parcs naturels régionaux, les réserves de biotope, etc. À terme le Ministère souhaiterait une stratégie permettant de placer d’ici 10 ans 2 % au moins du territoire terrestre métropolitain sous protection forte.
  • la protection des espèces
  • la diffusion des enjeux de la biodiversité grâce notamment à la SNB
  • une présence sur la scène internationale (ratification de conventions, etc.)

En 2008, le Programme des Nations unies pour l'environnement a annoncé la création d'un « groupe intergouvernemental d'experts sur la biodiversité » construit sur le modèle du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat).
L'ONU a proclamé 2010 comme l'année internationale de la biodiversité. Cette année s'est conclue par la Conférence de Nagoya qui a reconnu l'échec des conventions internationales précédentes et a proposé de nouveaux objectifs (Protocole de Nagoya). La France est également en train réviser la SNB, notamment à cause du constat partagé de la non-atteinte des « objectifs 2010 ».


Sources :
[1] Costanza R., 1997, The Value of the World's Ecosystem Services and Natura Capital, Nature Vol. 387, 15 May 1987 (p 253-260)

[2] Persiaux R., 2011, « Quelle valeur attribuer à la biodiversité? », la recherche n°448, janvier 2011, Special biodiversité

[3] Dossier - Quelle biodiversité pour demain ? Actu-Environnement.com - Publié le 18/10/2010

Pour en savoir plus :


Auteur du texte : Charlotte Mucig - CETE de l'Est – Laboratoire Régional des Ponts et Chaussées de Nancy


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